Portrait d'Udalric Viet dans les années 1930 |
Voici la retranscription des carnets du lieutenant-colonel Udalric Viet effectuée par les élèves de la classe de 601 L / ES. Elle comprend la couverture originale dessinée par son frère Paul Viet, avec le titre "Une belle carrière de soldat" et les photos insérées dans le récit, dans l'ordre d'origine. Le texte est complété par une annexe I comprenant la liste des abréviations, une annexe II comprenant un fragment du récit d'Udalric Viet pour la fin de la guerre, avec des informations tirées de son dossier militaire et une annexe III avec une citation du 15 juin 1940 qui ne figure pas dans les carnets.
Morceau d'uniforme, ruban de la croix de guerre 14-18, insignes de chasseur à pied ayant appartenu à Udalric Viet. |
Les cartes illustrant le récit ont été rajoutées pour que le lecteur puisse se repérer, de même des photos d'objets ayant appartenu à Udalric Viet ont été incluses. Le lecteur pourra aussi consulter, sur le site Mémoire des Hommes, les Journaux des Marches et Opérations (J.M.O.) du 18ème BCP (août 1914), du 120ème BCP (1915), et surtout ceux du 4ème BCP (1916 et 1917) exceptionnellement riches en relevés des tranchées et cartes topographiques plus celui du 6ème Régiment de Tirailleurs Algériens (août - novembre 1918) pour la fin de la Grande Guerre.
Le lecteur pourra aussi consulter, à titre de comparaison, le carnet de guerre du caporal Jean Hacquard, du 120ème Régiment d'Infanterie, qui relate les batailles d'août 1914 jusqu'à la bataille de Bellefontaine.
http://varoquaux-1916-2016.blogspot.com/2018/06/mon-petit-roman-carnet-de-guerre-du.html
Les explications, biographies, études et analyses critiques du présent texte sont consultables en regardant les articles plus anciens de ce site. Un élément nouveau est apparu en 2019, lorsque nous avons consulté l'historique du 18ème BCP sur le site Gallica: le début du récit, avec la mobilisation, comporte des expressions et de courts passages identiques à ceux du carnet d'Udalric Viet ! Pourtant, l'étude des pages manuscrites restantes montre qu'Udalric Viet a composé son récit durant la guerre. L'historique du 18ème BCP aurait-il été partiellement inspiré par le récit de notre personnage ? Nous ne pouvons répondre à cette question...
Pour la retranscription, conformément au manuscrit, les pages 2 à 10 relatent les états de services d'Udalric Viet dont le récit à proprement dit commence page 11 sous le titre "Quatre années de guerre sous l'uniforme chasseur", suivi du récit composé par son frère Paul Viet pour les événements survenus après 1918.
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-2-
DECORATIONS
______________
Commandeur
de la légion d'honneur
Médaille
Militaire
Croix
de guerre 1914-1918
(2
palmes – 2 étoiles)
Croix
de guerre TOE
Idem
1939-45
(1
palme – 1 étoile)
Croix
du combattant
Médaille
interalliée
Médaille
commémorative 1914-18
Médaille
de Verdun
Médaille
des blessés
Croix
des services volontaires
Médaille
Anglaise de la conduite distinguée
Military
Medal
Ordre
Royal de la couronne de Yougoslavie
Médaille
d'honneur Franco-Britannique 1939-45
-3-
VIET
Udalric Victor Armand
Né
à FISMES (Marne) le 30 avril 1894
Décédé
à BOURG EN BRESSE LE 8 novembre 1961
______________
Engagé
volontaire le 13 Septembre 1913
Retraité
le 13 Septembre 1950
_______________
Caporal
le 13 Mars 1914
Sergent
le 27 Juillet 1914
Adjudant
le 20 Juin 1916
Adjudant
Chef le 24 Juin 1917
S/Lieutenant
à TT le 26 Juillet 1918
S/Lieutenant
à TD le 8 Août 1918
Lieutenant
le 26 Juillet 1920
Capitaine
le 25 Juin 1932
Commandant
le 25 Septembre 1942
Lieutenant - Colonel le 1er Avril 1948
-4-
1950
Marseille : commandeur de la légion d'honneur
BLESSURES :
22 août 1914 1°/ plaie par balle, omoplate droite.
(projectile non extrait)
2°/ contusions à hauteur des côtes inférieures droites par éclat d'obus.
29 juillet 1915
3°/ contusions multiples après ensevelissement.
18 juillet 1916
4°/ commotion et contusions multiples
par projection (suite éclatement d'obus).
19 novembre
1916 5°/ contusion région lombaire par éclat d'obus.
26 février 1918
6°/ intoxication et brûlures par ypérite.
18 juillet 1918
7°/ intoxication par gaz.
21 août 1918
8°/ intoxication par gaz conjonctivite – laryngite.
19 octobre 1918 9°/ hémat[o]émèse par suite
d'intoxication par gaz.
Lieux où Udalric Viet fut blessé de 1914 à 1918 (dossier militaire dans la base Léonore, archives de Fontainebleau) |
-5-
CITATIONS
Ordre
de l'armée. 22 août 1914. 4ème armée
« Blessé grièvement au combat, au
moment où il conduisait avec énergie, sa section au feu »
Ordre de la 306è Brigade N°56 du 26/12/1916
« Sous-officier très
énergique et brave. »
« Pendant la période du 16 au 22
novembre a assuré l’exécution de corvées très pénibles, dans un terrain très
difficile, sous un bombardement très violent »
« Blessé au cours d'une mission de
liaison, a tenu à l'assurer avant de se faire évacuer sur le poste de
secours »
Ordre de la
11è DI N°179 du 26 mai 1917
« Excellent
sous-officier, très brave au feu. »
« A remarquablement commandé sa
section à l'attaque du 5 mai et jours suivants. »
« Déjà cité à l'ordre de l'Armée
le 22 août 1914 et de la Brigade le 19 décembre 1916. »
Citation
conférant la Médaille Militaire. Décret du Président de la République du 10/7 -
1917
-6-
VIET Udalric, Victor, Armand
N° matricule 7347
Adjudant
d'active 1ère Cie 4è BCP
« Sous-officier très brave, particulièrement énergique,
ayant participé à de nombreux engagements. »
« S'est
signalé, chaque fois, par son altitude remarquable sous le feu. »
(5
blessures – 2 citations)
Ordre
de la brigade n° 218 du 29/4/47
« Officier d'active entré dans la résistance dès 1941''
« A été, jusqu'en 1942, adjoint du
général DELESTRAINT, puis, en 1942, est entré dans la résistance active »
« A pu fournir, pendant toute la
période s'étendant de 1942 à la libération du Territoire, des renseignements
précieux pour le commandement. »
« Chef d'une équipe de
transmissions (radio LONDRES - ALGER) malgré tous les risques que les
opérations d'émissions comportaient, fait passer tous les messages, à la
satisfaction de tous (réseau Gallia) ».
« Chargé de rechercher les centres d'auto-détection de
l’ennemi, a pu, grâce à sa ténacité, en repérer un et à
-7-
« le rendre inutilisable, profitant
d'un manque de surveillance de la part de l'équipage d'une des voitures,
donnant, ainsi, plus de possibilités et [et] de netteté à nos émissions (Forêt
de SEILLAN [SEILLON] – septembre 1943)
».
«En outre, a été un recruteur de 1er ordre pour les FFI de
l'Ain ».
La présente citation comporte l'attribution de la Croix de
guerre avec l'étoile de bronze.
Ordre de
l'Armée du 23.2.1949
« Officier de haute valeur, résistant
de la première heure ».
« A créé, de toutes pièces, un
réseau d'évasions, auquel de nombreux
prisonniers de guerre et travailleurs STO ont dû la liberté ».
« Leur a fourni de fausses pièces d'identité, leur
permettant, ainsi, de rejoindre la France sans encombre ».
« En liaison avec la douane et les Employés de la SNCF, leur
facilite le passage de la ligne de démarcation. A leur arrivée en France,
assura leur hébergement et leur ravitaillement dans des conditions bien
pénibles et dangereuses ».
Cette citation comporte l'attribution de la Croix de guerre
avec palme.
-8-
POSITIONS ET
SERVICES
Aux armées 2-8-1914
Blessé à BELLEFONTAINE (Belgique)
évacué 22-8-1914
En traitement à l'Hôpital Temporaire à LISIEUX du 25/8 au 7-9-1914
Hospitalisé à l'Hôpital Civil de FONTENAY-LE-COMTE pour blessures de guerre
du 7/9 au 10-11-1914
du 7/9 au 10-11-1914
Affecté à la 11è Cie du 18è BCP 10-11-1914
Passé au 120è BCP
aux armées 17-2-1915
Blessé au LINGEKOFF et évacué 29-7-1915
En traitement à l'Hôpital Auxiliaire de
MARVEJOLS du 9 août au 12-10-1915
Convalescence de 1 mois du 13/10 au 13-11-1915
Affecté à la Cie de réentrainement du 4è BCP ledit jour
Passe au 4è BCP aux Armées 4-5-1916
Blessé au bois d'HARICOURT (Somme) 18-7-1916
(non évacué sur sa demande)
Blessé à SAILLY - SAILLISSEL (Somme) 19-11-1916
et évacué sur l'Hôpital numéro 106 à AMIENS
Rejoint son corps sur sa demande, aux
Armées 27-12-1916
Blessé à VERDUN 26-2-1918
en traitement à l'Ambulance 7/20, aux
Armées
Rejoint [son corps] sur sa demande 15-3-1918
-9-
Blessé (intoxication) 18-7-1918
Rejoint le 4ème BCP 30-7-1918
Passe au 6ème Régiment de Tirailleurs 23-8-1918
Blessé à THIESCOURT 21-8-1918
Rejoint aux Armées 16-9-1918
Blessé (gaz) et évacué 19-10-1918
Rejoint son Corps sur sa demande 5-11-1918
Part en ORIENT 3-5-1919
Passé au 18ème Régiment de Tirailleurs 1-7-1919
Passé à l'EM du Général Commandant en Chef des Armées Alliées en Orient 8-11-1919
Détaché à l'EM de la Division Territoriale de TURQUIE 30-11-1919
Rapatrié de l'Armée d'ORIENT 1-6-1921
Affecté au 26ème BCP 28-8-1921
Passé au 30ème BCP 29-10-1929
Désigné pour suivre les Cours de l'Ecole d'application de l'Infanterie
Affecté au 26ème R.I. 30-7-1932
Passé au 223ème R.I. comme Chef de Bataillon
Aux Armées 11-9-1939
Fait prisonnier à BRU (VOSGES) 21-6-1940
Interné au Camp N°2 à BACCARAT 22-6-1940
Interné à l'OFFLAG XIII à NUREMBERG 25-8-1940
Interné à l'OFFLAG à AMELBOURG 23-9-1941
-10-
Rapatrié sanitaire 29-9-1941
Rejoint la zone libre 3-10-1941
Hospitalisé à ROANNE 4-10-1941
En convalescence 28-10-1941
Placé en congé d'armistice 29-11-1941
Hospitalisé [à] Hôpital Mixte de
BEZIERS 17-11-1941
Quitte l'Hôpital 14-12-1941
Rejoint l'EM de la 7ème Division
Militaire 15-12-1941
Admis dans le Corps Civil de la
Chancellerie en qualité
d'Adjoint de 2è classe 13-12-1942
Maintenu dans le Corps de Chancellerie
en qualité
d'Adjoint
Principal de 2è classe
Affecté au Commissariat à la guerre à
BOURG 18-1-1943
Affecté à l'EM de la Subdivision de
l'AIN 4-9-1944
Affecté au Commandement du Bataillon de
sécurité de
l'AIN (Chef de Corps) 1-10-1944
Muté à la disposition du Commandement
Régional
des
Centres Départementaux de Libération 16-12-1944
Rappelé
à l'activité et maintenu dans son affectation actuelle 15-5-1945
Affecté à la Direction Régionale des
PGA (14ème Région) 25-1-1946
Qualité FFI officiellement reconnue.
Affecté à l'EM de la Subdivision de
MARSEILLE 1-1-1949
Admis à faire valoir ses droits à
pension de retraite 13-9-1950
La documentation qui précède à été
tirée, en presque totalité, des archives du Ministère des
Forces Armées.
"Affaires" (batailles) auxquelles prit part Udalric Viet de 1914 à 1918 (dossier militaire dans la base Léonore, archives de Fontainebleau, répertoire des lieux par Caroline Rodhain et Léa Lheureux) |
-11-
QUATRE
ANNEES DE GUERRE
SOUS
L’UNIFORME CHASSEUR
___________________
Le Bataillon (18e
BCP-Commandant GIRARD) vient de rejoindre sa garnison de LONGUYON, après avoir
passé 1 mois au Camp de SISSONNE.
Nous sommes le 30 Juillet 1914.
J’ai 10 mois de service ; je suis sergent depuis
quelques jours.
La situation internationale est
extrêmement tendue.
Tous, nous avons la certitude que
l’heure décisive est proche.
Dans la cour du quartier, les Officiers
-12-
réunis, par groupe, discutent.
Avec un camarade, nous décidons de
descendre en ville, après la soupe du soir, afin de prendre connaissance des
journaux de PARIS.
Nous apprenons l’ultimatum
autrichien à la SERBIE et la rupture des
relations diplomatiques entre les 2 pays.
En remontant au quartier, nous
rencontrons le Commandant et le saluons. De son côté, il nous souhaite une
bonne nuit.
A la devanture d’une librairie, parmi
les illustrés du jour, l’un d’eux représente le Drapeau de SAINT-CYR entouré de
sa garde. Nous évoquons la Devise de l’Ecole « S’INSTRUIRE POUR
VAINCRE ».
Le 31 juillet, à 4h, l’alerte est
donnée.
Chacun se prépare et, pendant 3 heures,
le quartier, véritable ruche donne le spectacle d’une activité prodigieuse mais
ordonnée.
-13-
En effet, tout se passe dans un ordre
parfait.
Les compagnies sont, enfin, rassemblées
dans leur rue, précédées de leur capitaine.
A 7 h 30, au coup de trompette du
commandant, la masse bleue s’ébranle vers ARRANCY et SPINCOURT.
Un dernier regard pour notre quartier
et, en route pour la grande aventure.
Le 9è BCP qui fait brigade avec nous se
dirige, lui aussi, vers ses positions de couverture.
Le 1er août parvient l’ordre
de mobilisation générale.
Le 4 août, rupture des relations
diplomatiques entre la FRANCE et
l’ALLEMAGNE.
Nous occupons PILLON.
Les cloches des villages environnants
annoncent la mobilisation.
L’entrée de la petite agglomération est
obstruée par des barricades composées de matériel agricole.
-14-
La nuit, circulation intense en direction de BAZAILLES où fonctionne un gros centre de réquisition.
De nombreux réservistes rejoignent leur formation.
De nombreux réservistes rejoignent leur formation.
Le tocsin s'est tu avec le jour.
Dès que celui-ci apparaît, l'organisation commence: trous individuels creusés en arrière des haies, travaux de campagne exécutés sur les hauteurs dominants le village.
Dès que celui-ci apparaît, l'organisation commence: trous individuels creusés en arrière des haies, travaux de campagne exécutés sur les hauteurs dominants le village.
Des éléments de cavalerie ennemie sont signalés par nos cavaliers qui patrouillent, sans arrêt, en direction de FILLIERES, MAIRY et JOPPECOURT.
Puis les escadrons de couverture allemands se rapprochent, peu à peu. Les 6 et 7 août, nos patrouilles de reconnaissance les dispersent à AVILLERS.
Le 8 août, l'ennemi attaque.
Toute une division de cavalerie, appuyée par de l'artillerie, et 2 bataillons environ d'infanterie, pousse de l'avant.
Conformément aux ordres reçus, le bataillon se replie, par échelons, et gagne MANGIENNES.
Le 91è RI continue sa mission de couverture pendant que s'achève notre concentration.
Le 8 août, l'ennemi attaque.
Toute une division de cavalerie, appuyée par de l'artillerie, et 2 bataillons environ d'infanterie, pousse de l'avant.
Conformément aux ordres reçus, le bataillon se replie, par échelons, et gagne MANGIENNES.
Le 91è RI continue sa mission de couverture pendant que s'achève notre concentration.
-15-
Nous
sommes placés en réserve à PEUVILLERS.
Des
artilleurs, traînant des canons, pris aux Allemands, arrivent dans le village.
Des voitures de paysans suivent,
chargées de l'armement pris à l'ennemi (fusils, lances, casques etc ...)
Le
Bataillon, en délire, engage avec les vainqueurs, de palpitantes conversations.
Notre
Général de Brigade, le Général CORDONNIER, entouré de chasseurs, raconte la
bataille de la veille et nous annonce qu'en attendant la fin ... prochaine de
la guerre, nous allions attaquer.
Un
douanier, en tenue de campagne, s'avance vers nous, le fusil à la main. Il a
donné un coup de baïonnette au cheval d'un dragon Badois et capturé le
cavalier.
C'est
l'homme du jour qui est très entouré.
Notre
séjour à PEUVILLERS sera de courte durée.
Nous
recevons le nombre de réservistes permettant de compléter les effectifs.
Sur
la grand' route qui passe à proximité du village, l'infanterie et la cavalerie
françaises s'écoulent, sans arrêt.
-16-
Au
cours de ces journées de repos, au cours desquelles nous faisons un peu
d'instruction, je suis désigné pour faire une patrouille dans un village voisin
où la présence de cavaliers ennemis a été signalée.
Nous
avançons avec précaution et fouillons le village.
Les
cavaliers se sont repliés. Mission terminée.
Le
18 Août nous quittons notre cantonnement et nous dirigeons sur la BELGIQUE
Le
soleil est de la partie.
Nous
traversons MONTMEDY. En longeant la voie du Chemin de fer, nous constatons que
des travaux ont été exécutés par le
Génie : travaux de destruction ; les ponts sont minés.
Après
un violent orage qui nous trempe jusqu'aux os, le soleil fait sa réapparition.
A
quelque distance d'un passage à niveau, un obus tombe sur la voie : dégâts
insignifiants.
Quelques
kilomètres plus loin, nous sommes survolés par un avion allemand.
Nous
traversons la frontière à OTHE.
Nous
progressons, maintenant, en colonne par un de chaque coté de la route.
Direction SOMMETHONNE
-17-
où
nous coucherons ce soir, 21 Août.
A
peine arrivés à quelques centaines de mètres du village, nous apprenons que des
cavaliers allemands arrivés, le matin, pour faire le cantonnement viennent de
partir, précipitamment.
Le
Chef de notre petit détachement ordonne la prudence et le silence puis détache
une patrouille qui confirme qu'il n'y a plus d'Allemands dans le village.
Ceux-ci avaient fait préparer un repas qui servira à nos Officiers.
Ils
ne se refusent rien les cavaliers allemands. Il est vrai que c'est l'habitant
qui fait les frais du repas.
Des
obstacles sont accumulés aux issues du village, des sentinelles sont placées.
Nuit calme.
Le
22 Août, nous nous acheminons vers notre premier combat.
Le
120eme RI est aux prises avec l'ennemi.
BELLEFONTAINE,
petit village au Nord a été pris et repris aux Allemands.
La frontière franco-belge en 1914. |
-18-
Nous
quittons une belle route et nous engageons dans un chemin de culture.
Autour
de nous, de beaux champs de blé.
Plus
loin, quelques vergers, puis des fermes entourées de bouquets d'arbres.
Dans
le ciel, quelques obus fusants qui, en général, éclatent trop haut.
Nous
nous dirigeons vers une fusillade assez lointaine qui paraît s'éteindre pour
reprendre, plus fournie, avec accompagnement de mitrailleuses.
Sur
un signe du Capitaine, toujours en tête de la Compagnie, nous prenons notre
formation de combat : petites colonnes, largement espacées.
Notre
progression se poursuit lente et régulière, l'arme à la main.
Enfin,
nous arrivons devant un large chemin creux dont les lèvres sont bordées de
haies très épaisses. Là, nous faisons une pause car, depuis le matin, nous
marchons, généralement à travers champs, marche très fatig[u]ante.
En
face de nous, toujours le même paysage.
Une
plaine coupée de buissons. Au fond, bouchant l'horizon, une petite crête,
légèrement boisée.
Notre
artillerie qui vient de prendre position
– 19 -
derrière nous entre en action très
rapidement. La cadence de tir est rapide.
Bientôt, la crête que nous apercevions, devant nous, se couvre
de fumée blanche.
Notre lieutenant commande :
Baïonnette au canon. Cela commence à devenir sérieux, bien que notre position
reste calme, mis à part le bruit du canon.
Tout à coup, nous entendons les
clairons du 120è R.I. qui, après le
refrain du Régiment, sonnent la charge qui accompagne une contre-attaque.
Nous n'avons pas la notion de l'heure
mais il y a un bon moment que nous sommes là.
En avant, toujours le même bruit de
fusillade, entrecoupé de sonneries de clairon.
Déjà les 3è et 4è Compagnies sont
engagées ainsi que notre section de
mitrailleuses et épaulent le 120è R.I
Sur notre droite, des chasseurs se
lèvent puis, c'est notre tour.
Toute la ligne s'est ébranlée. Nous
franchissons notre chemin creux puis c'est la charge.
-20-
Nous accélérons l'allure, l'arme haute.
Une sonnerie de clairon éclate pas très
loin, à droite . Des cris s'élèvent : c'est l'assaut.
Nos sacs nous paraissent légers.
Les Allemands paraissent surpris par la
rapidité et la vigueur de notre intervention.
Les balles sifflent. Au cours de notre
progression, nous rencontrons des cadavres allemands.
Quelques blessés de chez nous, nous
regardent passer.
Nous abandonnons le pas de charge et,
au milieu de la fumée, abordons les Allemands.
Sous la violence du choc, la ligne
ennemie plie pour, enfin, reculer.
Je donne mon premier coup de
baïonnette.
L'Allemand crispe la main sur mon fusil
puis s'effondre sans mot dire.
(Les camarades me diront, plus tard,
que j'étais pâle : il y avait de quoi).
Le tir de notre artillerie ne se
ralentit pas. En face de nous, plus d'Allemands, sauf de petits groupes qui
semblent vouloir se reformer.
Le lieutenant donne, alors, l'ordre de tirer sur les
groupes que nous pouvons repérer. Nous prenons, tranquillement, la position du
tireur à genou
-21-
et ouvrons le feu à volonté.
Il est midi, 14h peut être : le
soleil est très haut. Je profite de l'accalmie pour faire le point.
Tout le monde est là : pas de
casse. C'est l'essentiel.
Nous allons reprendre la marche en
avant.
C'est au milieu des gerbes de blé
fraîchement coupé que notre ligne de tirailleurs s’ébranle.
Nous allons lentement ce qui nous
repose, un tant soit peu, des fatigues de la matinée.
Les balles continuent à siffler autour
de nous sans qu'il soit possible de distinguer d’où partent les coups.
La chaleur devient intolérable.
Le terrain est jonché de cadavres des
deux camps et de blessés qui nous demandent à boire.
Tout à coup, je ressens un choc brutal
sur la nuque, je titube puis, au bout de quelques pas, je tombe sur le côté, la
figure contre le sol.
J'ai l'impression que l'on me verse de
l'eau tiède dans le cou. Ma main droite est couverte de sang.
-22-
Tout s'embrouille dans ma tête.
Je suis dans un état lamentable.
Cependant je reviens à moi et me débarrasse d'une partie de mon équipement :
sac, musette.
Enfin, je réalise pleinement.
J'ai reçu une balle dans le haut du dos
et, pour l'instant, je suis hors de combat. Mon fusil est près de moi. J’ai
défait mon bidon et le garde à portée de la main quoiqu'il soit pratiquement
vide.
Le lieutenant TOURET passe près de moi.
Il a la main entourée d'un mouchoir
couvert de sang.
Il me demande de lui faire, si
possible, un pansement et vient s'asseoir tout près de moi, sur une gerbe de
blé.
Je retire le paquet de pansement qu'il
avait dans sa poche et, péniblement, je lui fais un pansement sommaire.
Je ne suis pas solide, j'ai dû perdre beaucoup de sang. J'ai
une soif terrible et plus d'eau.
Brutalement, un obus, de faible
calibre, éclate à proximité de notre petit groupe. Un éclat
-23-
me frappe, au coté droit, me coupant la
respiration.
Cette fois, j'ai l'impression d'être
bien touché. L'éclat ne paraît pas avoir pénétré. Effectivement, sa course a
été stoppée par une cartouchière.
Le lieutenant a été atteint, à nouveau,
assez sérieusement, semble t-il, car il a l'air de souffrir beaucoup.
Étendu sur le sol, il ne bouge pas, ne
cause pas.
Je me débarrasse du restant de mon
équipement, ce qui facilite ma respiration et je m'étends sur des gerbes de blé.
Il n'y a plus qu'à attendre.
Je fais un effort pour me soulever sur
les bras. Le changement de position me fait du bien passagèrement.
Je me rends compte qu'il m'est possible
de remuer les jambes. Cela me donne du courage.
Lors de ma chute, j'ai perdu mon képi.
Je le remplace par un du 120e RI abandonné à proximité. Le soleil, sur la tête,
commençait à être insupportable.
Je voudrais bien me sortir de ces
lieux, si peu hospitaliers, mais mes mouvements sont
-24-
extrêmement pénibles.
Et puis, je suis, parfois, à demi
inconscient.
Tout à coup, je suis tiré de ma solitude
par un jappement plaintif.
Tout près de moi « Clairon »,
le chien de la compagnie et plus particulièrement de ma section, cherche à
attirer mon attention.
La pauvre bête souffre, elle aussi,
terriblement de la soif et flaire mon bidon, hélas vide.
« Clairon » me tient
compagnie quelque temps.
Peut-être se souvient-il que, lorsque
j’étais caporal d’ordinaire, je lui ai toujours mis sa ration de côté.
Depuis quelques jours, il était en
absence illégale. Nous lui pardonnerons puisqu’il est venu rejoindre sa
compagnie sur la ligne de feu.
Le repos me fait du bien.
Je me souviens, qu’au cours de la
progression, nous avons laissé sur notre droite, dans un boqueteau, le groupe
des agents de liaison du commandant. C’est vers ce point que je dois me
-25-
rendre ... s'il y a moyen.
Je rassemble mes forces et c'est
péniblement que je chemine vers l'objectif
que je me suis fixé.
Le bruit du canon ne cesse pas mais
j'ai nettement l'impression de m'éloigner de l'artillerie.
Sur le terrain, de nombreux équipements
abandonnés.
Puis, toujours des cadavres français et
allemands voisinant avec des blessés.
Cependant, j'arrive, tant bien que mal,
au poste de commandement.
Au milieu d'un groupe d'Officiers, je
vois le commandant qui donne des ordres à ses agents de liaison.
Dès qu'il m'aperçoit, il vient vers
moi, les mains tendues.
Il s’informe de mon état, s'inquiète
des conditions dans lesquelles j'ai été blessé et ajoute : «
Crachez ! ».
Voyant que je ne crache pas de sang, il
me dit : « C'est que la balle n'a fait aucun dégât dans les poumons ».
Après ces paroles réconfortantes, le
commandant
-26-
m'engage à me rendre dans une ferme qui
est un peu plus loin, où je trouverai à boire et où l'on pourra me faire un
pansement.
Difficilement, je me dirige vers la
ferme, aidé par un autre blessé.
Enfin arrivés nous entrons dans une
grange où un certain nombre de blessés sont étendus sur le sol recouvert de
paille.
Un civil, probablement le propriétaire
de la ferme va, de groupe en groupe, un seau à la main, distribuant de l'eau,
par petite quantité.
Un médecin lui ayant interdit de donner
à boire aux blessés touchés au ventre, le brave homme, réfractaire à toute
explication, rationnait tout le monde.
Dans un coin, des blessés ne bougent
pas, se plaignant sans arrêt.
C'est dans cette ambiance débilitante
que se passe la nuit du 22 au 23 août.
Le matin, le fermier réapparaît avec un
grand seau de lait dans lequel nous puisons.
Puis, il nous annonce qu'il va nous
conduire à LA HAGE où nous pourrons
recevoir des soins. Nous prenons place dans un tombereau.
-27-
Tout est calme. L'on a l'impression de
sortir d'un rêve.
Nous arrivons au village qui n'est pas
très loin : quelques maisons entourant une petite église.
Au dessus du portail flotte un fanion
de la Croix-Rouge.
Placé sur un brancard maculé de sang,
je suis introduit dans l'église ou un médecin - major examine chacun des
blessés.
Un infirmier me lave le dos qui est
couvert de sang coagulé, me badigeonne de teinture d'iode et me fait un
pansement m'entourant la poitrine et le dos.
Cela me fait grand bien.
Les infirmiers me remettent ma capote
et me placent sur un autre brancard pour être chargé, ensuite, avec d'autres
blessés, dans une charrette de paysan, sur un lit de paille.
Je n'ai pas vu, pendant cette halte,
d'autres blessés du bataillon. Un capitaine du 9éme BCP grièvement atteint,
souffre horriblement et se plaint.
Notre charrette prend la route. Les
maisons et fermes portent des traces toutes fraîches de la bataille.
De-ci, de-là, des isolés qui ont perdu leur unité.
-28-
Au loin, nous entendons le bruit du
canon et de la fusillade.
La nuit tombe lorsque nous faisons
notre entrée à MONTMEDY.
Nous sommes dirigés sur la grande place
située devant la caserne.
Cette place est encombrée de blessés
sur des brancards. Des dames de la Croix-Rouge s'affairent, distribuant
quelques boissons et aliments.
C'est surtout la soif qui me tenaille.
J'hérite d'une tasse de bouillon, de quelques légumes et d'un peu de confiture.
C'est mon premier repas depuis le 21
Août, midi.
Ici, c'est un véritable centre de
triage, les plus touchés sont dirigés sur l’Hôpital.
Des artilleurs, du 5ème régiment de
forteresse, donnent un coup de main.
Parmi eux, je reconnais PELLUET, un bon
camarade de SEDAN qui, interpellé, s'empresse auprès de moi. Après s’être intéressé à mon état, il me propose de me
faire conduire à la gare où un premier et d'ailleurs unique convoi est en voie
de formation. La plupart des blessés, dont le lieutenant TOURET seront faits
prisonniers.
-29-
Vers 22h notre train se met en marche.
Nous sommes dans des wagons de
marchandises, non aménagés, Dans le mien, nous sommes une quinzaine n'ayant pas
reçu de blessures très graves.
Une lanterne nous éclaire.
Nous faisons sommairement connaissance.
Chacun se renseigne, auprès de son voisin, en particulier sur son domicile
habituel. C'est ainsi que mon compagnon le plus proche, m'offre de m'alerter au
passage à SEDAN.
La porte du wagon est grande ouverte.
Il fait bon, surtout comparativement aux nuits précédentes.
L'un des blessés raconte des histoires
drôles sans se lasser, ce qui me fait rire mais, aussi, m'occasionne une
douleur au côté.
Le jour est venu. Nous passons sur le
pont de BAZEILLES et entrons en gare de SEDAN.
Des camarades approchent mon brancard
de la porte à glissière afin de me permettre, si possible, de rencontrer des
visages connus.
Personne, sauf un sous-chef de gare qui
se charge de faire prévenir ma famille. J’insiste sur le fait que mon état ne
doit lui occasionner aucune inquiétude.
-30-
Un employé du Chemin de fer nous donne
un peu d'eau, un autre nous offre
des cigarettes.
Le train reprend sa marche. Le temps
semble long ; mon pansement aurait besoin d'être remplacé.
Nous atteignons REIMS dans le courant de l'après-midi.
Tous les blessés couchés sont descendus
sur le quai
pour être, ensuite, dirigés sur le bâtiment de la Petite vitesse.
pour être, ensuite, dirigés sur le bâtiment de la Petite vitesse.
Un jeune major me fait enlever ma
capote (je n'ai plus de chemise). Ensuite, un vieil infirmier me fait un
pansement tandis qu'une dame de la Croix-Rouge me donne bouillon et légumes.
Puis, réembarquement dans un wagon de
voyageurs, cette fois. J'ai une
banquette pour moi seul.
Nous nous dirigeons vers PARIS. Tout le
long du trajet, nous sommes acclamés par la population. Aux arrêts, nous
recevons gâteaux et cigarettes.
Puis, nous nous engageons sur
l'Ouest-Etat pour, finalement, débarquer à LISIEUX.
Je suis dirigé sur l’Hôpital Temporaire n°29.
Nous sommes le 25 au matin.
-31-
Tout le personnel est aux petits soins
pour nous. Les chambres sont spacieuses et d'une propreté parfaite.
Une première visite est passée par le
Médecin-Chef qui s’étonne que ma balle ne soit pas sortie.
Il se contente d'une légère désinfection.
Le lendemain, visite de 2 médecins.
L'un d'eux, intrigué par ma balle, sonde ma blessure et me fait souffrir.
Cette opération devait se
renouveler plusieurs jours de suite.
Quelque temps après, je fais partie
d'un groupe qui va se reposer dans une propriété mise à la disposition de
l’Hôpital par la famille SCHLUMBERGER.
C'est là, qu'entouré de soins et gâté,
mon séjour à LISIEUX s'est terminé.
Je passe une dernière visite au cours
de laquelle le major s'étonne de voir mon côté droit tuméfié. Sur sa demande,
je lui raconte l'histoire de mon éclat d'obus. C'est alors qu'il enregistre
cette 2ème blessure qui, parfois, est douloureuse, en raison de l'absence de
bandage à l'origine.
Je suis, ensuite dirigé sur le Dépôt du
18ème BCP à FONTENAY-LE-COMTE où mon séjour sera de courte durée
-32-
car je suis admis dans un centre de
repos à Saint HILAIRE-DES-LOGES où je resterai jusqu'en Octobre.
Vie calme, bonne table, population
acc[u]euillante qui s'est ingéniée à rendre notre séjour agréable.
Puis, je rejoins le Dépôt du Bataillon
où j'ai le plaisir de trouver beaucoup de courrier, en retard, et notamment des
lettres de ma famille, expédiées, en Août, de SEDAN.
En février 1915, le Dépôt forme une
Compagnie nécessaire à la mise sur pied d'un Bataillon de Chasseurs de marche
du 20ème C.A. (le 120ème BCP).
Nos chasseurs seront tous des jeunes de
la classe 15 encadrés par des Officiers et sous-officiers (dont je fais partie)
ayant déjà été au front.
La compagnie embarque à destination de
SENNECAY-LE-GRAND où nous arrivons après 5 jours de voyage.
Le Bataillon est ensuite dirigé sur le
camp de MAILLY afin de parfaire son instruction. Enfin, nous prenons la
direction des VOSGES.
Après avoir passé dans divers
cantonnements, nous faisons mouvement vers le HONECK.
-33-
La couche de neige, épaisse, rend la
marche pénible.
Nous arrivons en 2ème ligne où nous
relevons une unité de chasseurs alpins.
Secteur calme où nous restons peu de
temps.
Après un repos à CORCIEUX, nous
reprenons les lignes au nord du Col de WESTEIN
Des corvées sont occupées à la
construction d'un large boyau muletier.
Nous avons plusieurs tués et blessés.
Relevés de nouveau, nous sommes dirigés
vers le Col de SAINTE MARIE en vue de l'attaque de LA FONTENELLE, attaque
déclanchée dans de bonnes conditions et au cours de laquelle nous faisons de
nombreux prisonniers.
Le 21 juillet nous relevons le 30ème BCA et occupons des tranchées
profondes, généralement couvertes.
L’ennemi est, à peu près, à 1000 m. de
nous sur les pentes descendantes qui nous font face.
A proximité, règne une activité
intense.
Nous sentons qu'une offensive se
prépare.
Effectivement, nous allons creuser des
parallèles de départ aux abords de notre boyau.
Puis, nous nous mettons en route vers
les
-34-
pentes, soit du LINGE, soit du
BARENKOFF.
A la sortie du boyau, nous débouchons,
sans dégât, sur un glacis, au pied du LINGE.
C'est là que nous allons attaquer.
Notre artillerie, silencieuse jusque
là, entre en action. Le bruit de la canonnade se répercute dans la montagne.
Le tir est rapide et brutal. La crête
du LINGE, couverte de sapins, est pilonnée.
Notre progression est arrêtée par le
tir des mitrailleuses.
Nos pertes sont sérieuses. L'ordre
d'arrêter l'attaque arrive.
Nous sommes parvenus dans une grande
tranchée qui n'a pas beaucoup souffert du tir de l'artillerie. Nous nous
installons en retournant le parapet.
Les liaisons sont pratiquement
impossibles.
La progression des renforts est
entravée par l'exiguïté du boyau : montée des sections, descente des
blessés cherchant à s'éloigner le plus rapidement possible.
La fusillade est presque continue, le
tir de nos 155 ne se ralentit pas.
Le massif du Linge à l'ouest de Colmar |
-35-
La nuit venue, la relève des unités du
1er échelon commence. L’on entend les cris des blessés restés sur place. Nous assurons, tant bien
que mal, l’évacuation de ceux qui sont à proximité.
Des cadavres allemands, qui gênent la
circulation, sont placés sur le dessus du parapet.
Le 26 juillet, après avoir reconnu les
emplacements de l’organisation ennemie, et à la suite d’une très sérieuse préparation
d’ artillerie, nous reprenons l’attaque.
Le sommet du LINGE est notre objectif.
Nous l’atteignons, en coopération avec
le 30è BCA mais au prix d’importants sacrifices.
C’est en montant à l’assaut de la
dernière ligne de blockhaus que je saute avec l’un d’eux et ses occupants.
Je devais passer la nuit sous les
débris : rails, rondins, etc…
Dégagé au petit jour, je suis dirigé
vers un poste de secours. C’est à BRUYERES que j’échoue après une longue étape
dont la première partie s’est effectuée en cacolet dans des sentiers étroits.
-36 -
Après une visite sommaire à l’hôpital
d'évacuation, je suis embarqué, avec d'autres blessés, pour une destination
inconnue.
Notre installation est
parfaite. Quels progrès depuis 1914 !
Enfin, nous aboutissons à MARVEJOLS.
Mon séjour, ici, durera quelques temps.
Nous sommes dans un hôpital complémentaire de la Croix-Rouge dont
l'infirmière-major est la Marquise de CHAMBRUN.
Ici, rien que des rescapés du LINGE.
Tous le monde est plein d'attention
pour nous.
Notre menu est soigné. En ma qualité de "plus haut gradé hospitalisé", l'infirmière me fait demander, chaque matin, ce qui nous ferait plaisir pour les repas de la journée.
Tous les jours, elle me fait conduire à
la salle des pansements où l'on me fait des massages et des jets d'air chaud sur
les reins.
Il paraît que j'ai été bien touché.
J’ai besoin d'une canne pour me déplacer.
Cependant, mon état s'améliore.
Progressi-
-37-
-vement, il m'est permis de faire de
plus longues sorties et, à plusieurs reprises, je suis invité, par Madame DE
CHAMBRUN, à passer d'agréables après-midis dans sa magnifique propriété.
C'est à MARVEJOLS que j'ai reçu la
Croix de guerre accompagnant ma citation d'août 1914.
Madame DE CHAMBRUN a pu obtenir, de
l'autorité militaire, le déplacement d'un Bataillon d'infanterie de MENDE.
Aussi, c'est un événement marquant pour
la Cité. Une foule nombreuse assiste à la cérémonie à l'issue de laquelle deux
jeunes filles costumées en Alsacienne et en Lorraine, accompagnées de vétérans
de 1870, m'offrent des fleurs.
Un apéritif d'honneur nous rassemble,
ensuite au grand café.
Après 1 mois de convalescence, je rejoins à GIVRY (Saône -et - Loire) le dépôt des 4ème et 120ème B.C.P.
Séjour agréable. Bons chefs, bons
camarades, population accueillante.
-38-
Une décision journalière du 4ème
BCP m’apprend que le Bataillon a un nouveau chef : le Commandant POMPEY.
Madame POMPEY étant une amie de la
famille, j’écris au Commandant.
Par courrier, celui-ci me fait
connaître qu’il m’acceptera de grand cœur dans son Bataillon et m’invite à
faire, d’urgence, une demande de départ au front.
Déclaré apte à faire campagne, je n’ai
plus qu’à attendre le prochain renfort.
Peu de temps après, je fais partie d’un
détachement qui embarque en direction de NOYELLES – SUR- MER.
A mon arrivée, un planton me dirige
vers le PC du Commandant auquel je me présente. Après une brève conversation,
il m’affecte à la SHR.
A la tombée de la nuit, le Commandant
m’invite à sa popote où nous parlons de nos familles respectives. Puis il
m’offre le poste d’Adjudant de Bataillon que j’occupe peu de temps après.
Nous séjournons dans divers
cantonnements puis partons pour la région de BRAY – SUR – SOMME.
Sur les routes, c’est un flot presque
ininterrompu d’unités montant vers le front : une offensive se prépare.
Le secteur de la Somme, d'Amiens à Sailly. La Ferme du Priez et la tranchée de Négotin se trouvaient entre Frégicourt et Sailly. |
-39-
Effectivement, l'attaque est
déclanchée. Notre Division (la 11ème) atteint ses objectifs. Le 11 juillet,
c'est notre tour de monter en ligne. Nous allons relever à HARDECOURT, point
extrême de l'avance de la Division, le 1er Bataillon du 146ème R.I.
Vers 1h du matin, nos 75, qui sont à
proximité, déclanchent un tir de barrage. Les tranchées allemandes sont
bouleversées.
Je suis envoyé en reconnaissance et
tombe sur un réseau de barbelés incomplètement détruit : mes effets
souffrent beaucoup.
Le 12, le capitaine DE ROHAN est tué,
alors qu'il effectuait une reconnaissance en avant des lignes. Son corps est
ramené par un sous - officier de la compagnie.
Depuis quelques jours, le Commandant
m'a chargé d'une mission supplémentaire qui n'est pas une sinécure.
Chaque soir, je dois me rendre aux
emplacements d'arrivée du convoi apportant les repas, afin d'assurer le bon
ordre des distributions.
Nous empruntons toujours le même
itinéraire.
Quoique les passages particulièrement
dangereux soient connus, la prudence est notre guide.
JMO du 4è BCP montrant l'objectif à atteindre le 20 juillet 1916 : la tranchée de Koloméa appelée tranchée du Calvaire par Udalric Viet. |
-40-
Le 17 Juillet, nous sommes surpris par
un tir très nourri de l'artillerie
allemande. Après quelques instants de repos dans un abri, nous reprenons notre
marche au milieu de la fumée.
Brutalement, un obus tombe à proximité.
Je suis couché par la déflagration et certainement contusionné. Je saigne
abondamment du nez.
Mon agent de liaison n'est pas touché.
Il me conduit au poste de secours d'où je suis dirigé sur BRAY-SUR-SOMME.
Je ne suis pas gravement atteint.
Le 20 Juillet, le Bataillon attaque la
tranchée du CALVAIRE [tranchée de Koloméa selon le JMO du bataillon] et atteint, rapidement, son objectif mais les pertes sont
lourdes : 270 Officiers, sous- officiers et chasseurs sont mis hors de combat.
Par contre, le bataillon a fait plusieurs centaines de prisonniers.
Le 9 Août, nous remontons en ligne et
attaquons le 18. Dans un bel élan, le Bataillon dépasse ses objectifs et fait
300 prisonniers dont 7 officiers et s'empare de 7 canons de 77 et de
mitrailleuses.
Nos pertes sont légères.
Les prisonniers sont groupés par 60
environ
-41-
et conduits à la brigade par
des chasseurs.
Je suis chargé de désarmer et fouiller
les prisonniers avant leur départ des lignes. Je récupère revolvers et
poignards car nous avons eu, récemment, une aventure.
Un prisonnier – officier d'artillerie -
a tiré sur un chasseur d'escorte. Inutile de dire qu'il a été exécuté sur le
champ. Afin de ne pas gêner la circulation, il est placé sur le bord de la
tranchée.
Les téléphonistes de chez nous qui passent en déroulant leur
câble, lui mettent le fil dans la main tendue vers le ciel.
Vers 15 h, les Allemands
contre-attaquent, reprennent une partie
des positions perdues, par eux, le matin et nous font quelques prisonniers.
Nous avons 2 officiers tués.
L'attaque s'étend sur tout le front de
la division. A notre tour de contre-attaquer. Nous reprenons le terrain perdu
et ramenons nos morts et blessés. Ceux-ci ont été détroussés.
Vive réaction de notre part : un
véritable
-42-
massacre s'ensuit. Nous pénétrons
jusqu'aux positions de l'artillerie.
Le 21 Août nous sommes relevés par le 1er C.A.
Le 2 novembre, nous nous mettons en
route pour occuper le ravin de MAUREPAS.
Dans la nuit le bataillon se forme en
colonne par 2 à grands intervalles. A 1500 m. de COMBLES, nous touchons des
grenades et des artifices dans des sacs à terre.
A la ferme LE PRIEZ, nous trouvons des
guides qui doivent nous conduire à la 3ème Brigade du MAROC à laquelle nous
sommes momentanément rattachés.
Tout le long
de la route, nous rencontrons des zouaves et des tirailleurs, plus ou moins
blessés.
De temps en temps, une fusée éclaire
une petite partie du paysage.
La marche est pénible dans ce terrain,
bouleversé lors des combats de juillet. Partout d'énormes cratères remplis
d'eau, partout une boue gluante.
Nous marchons en silence, le dos
courbé.
Parfois, un obus éclate à proximité,
nous couvrant de boue.
-43-
des NEGOTTINS où nous trouvons des
cadavres et des blessés des derniers combats.
A proximité immédiate de nous, le
Commandant et son officier adjoint reçoivent les consignes.
A la question « Où est
l'ennemi ?», le Colonel du régiment de Zouaves que nous relevons
répond : « Les Allemands ont attaqué en force, ébranlant nos
positions. Les Zouaves ont résisté mais des groupes d'ennemis se sont
infiltrés. Il n'y a plus de ligne continue ».
Les jours suivants, je m'occupe de
corvées, soit de ravitaillement, soit de matériel divers, accompagné du clairon
BADIER, brave gars, courageux, qui est de toutes mes sorties.
Il pleut, sans arrêt. La boue est de
plus en plus envahissante. Sur mes chaussures, je dois mettre des sacs à terre,
afin de faciliter la marche.
Les Allemands bombardent efficacement
nos tranchées. Des agents de liaison et des pionniers sont tués.
Un obus qui n'éclate pas, pénètre dans
le poste de secours. Les territoriaux apportent des munitions.
-44-
Une attaque est décommandée en raison
de l'état de la troupe.
Au moment où je quitte mon abri, un
obus explose touchant plusieurs chasseurs et me couvrant littéralement de boue.
Je suis aveuglé.
Un matin, le commandant me charge, par
message, de vérifier le fonctionnement de la chaîne de coureurs entre son PC et
celui de la Brigade.
Le chasseur THIBAULT, qui m'est très
dévoué, m'accompagne.
A quelque distance du PC de la Brigade,
nous trouvons l'un de nos coureurs, grièvement blessé et incapable de
poursuivre sa mission.
Nous prenons le message et le portons,
nous - même, à destination en signalant la présence de ce blessé grave.
En revenant vers le Bataillon, nous
sommes surpris par un tir de barrage extrêmement violent. Pas d'abri à proximité.
Je suis touché à la hanche. Le chasseur
qui m'accompagne m'aide à me relever puis à gagner un PC proche d'où je fais
téléphoner au Bataillon le résultat de ma mission et signaler l’état
-45-
dans lequel je me trouve.
Ici, personne pour me faire un
pansement dont j'ai grand besoin car je perds beaucoup de sang.
Je me dirige vers la ferme LE PRIEZ où
je trouve un médecin-major qui me fait un pansement d'urgence qui doit me
permettre de gagner la cote 108 où se trouve l'ambulance divisionnaire.
Je fais de nombreuses pauses.
Alors que j'étais assis sur le bord
d'un chemin, une ambulancière canadienne arrête sa voiture, me fait monter et
me transporte vers l’hôpital d'évacuation.
Nous arrivons à l’hôpital
anglais de BRAY-SUR-SOMME. Je crois être le seul, sauf ma canadienne
d'ambulancière, à parler le français dans la vaste tente où elle me conduit.
L'on me dépouille de mes
effets puis, après une toilette sérieuse qui est la bienvenue, un médecin
anglais désinfecte ma plaie.
Dans cette plaie, située au
dessus de ma hanche gauche, de minuscules morceaux de mon masque et de sa boîte
métallique.
Enfin, je reçois du linge
propre et suis confortablement couché.
C'est seulement à ce moment,
semble t-il
-46-
que, par le truchement de
l’infirmière, le Docteur s’aperçoit que je ne suis pas Anglais. Raison de plus
pour être bien soigné, ajoute la jeune fille à mon intention.
Puis, avant de repartir elle vient me
dire « au revoir » et me souhaiter bonne chance.
Je continue à recevoir des soins
attentifs.
Quelques jours après, les médecins
décident de me faire partir pour AMIENS, en péniche sanitaire pour éviter les
heurts.
Voyage confortable, effectivement.
Arrivé à AMIENS, je suis transporté à
l’hôpital complémentaire 106, rue Frédéric Petit.
L’on m’installe un système de poids
suspendus à une poulie, que je conserve toute la journée. Le soir, l’on me
retire les poids pour me descendre à la cave, car les avions allemands viennent
tous les soirs, et font des dégâts, parfois des victimes.
J’ai le plaisir de recevoir la visite
de plusieurs Sedanais.
Petit à petit, ma hanche se rétablit et
je quitte l’hôpital.
-47-
Après quelques jours de convalescence,
passés à PARIS, je cherche à rejoindre le Bataillon qui se trouve dans l’Est,
parait-il.
En effet, après de multiples
péripéties, j’aboutis à HEULMONT-AGINCOURT (région de NANCY). Là, j’apprends
que le Bataillon est en ligne à proximité de CHAMPENOUX.
Le Commandant m’accueille avec une
satisfaction visible.
Ainsi prend fin cette année 1916, au
cours de laquelle j’ai participé à des opérations souvent pénibles.
Secteur d'Eulmont-Agincourt-Champenoux près de Nancy. Le 4ème BCP se trouvait à Brin-sur-Seille et au nord de la forêt de Champenoux |
Le 1er Janvier 1917, nous
sommes éveillés par les sonneries de la fanfare. En cœur, nous allons présenter
nos vœux au Commandant qui nous remercie d’un mot aimable.
Je suis affecté à la 1ère
Compagnie, comme Chef de section.
Nous allons de cantonnement en cantonnement
dans la région de NANCY que nous quittons pour un petit village situé au nord
de DORMANS.
Puis nous nous rapprochons du CHEMIN
DES DAMES. Nous sommes en Avril 1917.
-48-
Le 16 avril, à 16h, nous recevons de
nombreuses consignes en vue de l’attaque qui, paraît-il est la dernière.
L’ordre du jour du général NIVELLE nous
est communiqué.
La division doit attaquer en 2ème
vague : le Bataillon est en réserve de Division.
Dans le courant de la nuit, nous
prenons place dans un petit bois situé sur les pentes Ouest du ravin de
MADAGASCAR.
Puis nous reprenons une marche pénible
dans un étroit boyau. Je marche en tête de la Compagnie.
Un homme de la 3ème section est brûlé vif
par suite de l’explosion d’une grenade incendiaire qui a heurté la paroi du
boyau. Il se produit un flottement dans la colonne.
A 6h30, l’ordre d’attaque est donné.
Les batteries d’artillerie se
déplacent. Nous avons l’impression que l’attaque progresse ce qui est bientôt
confirmé par le passage d’importants groupes de prisonniers.
Nous sommes pris sous un violent tir
d’artillerie puis reprenons notre marche et arrivons à
-49-
MOUSSY. Le terrain est jonché de
cadavres français et allemands.
La pluie tombe sans arrêt, accompagnée
de neige fondue. Un avion s’est abattu à proximité du chemin. Le pilote, un
lieutenant que nous saluons, au passage, est à demi sorti de la carlingue. Sans
doute a-t-il été tué sur le coup.
Nous allons prendre position au bois du
PARADIS.
Nous sommes chargés comme des mulets,
ayant touché beaucoup de vivres en prévision d’une importante progression …
Secteur de Moussy et de Braye-en-Laonnois (Chemin des Dames). La tranchée du Havre et le Bois du Drapeau se trouvaient aux abords de Braye; le Bois du Paradis au nord de Chivy. |
La tranchée du Havre est au nord-ouest de Braye-en-Laonnois. |
Je suis désigné par le commandant pour reconnaître si dans les abords immédiats, il n’y aurait pas un abri abandonné pouvant être utilisé comme P.C.
Je pars avec un clairon.
Nous arrivons vers l’entrée d’une sape
intacte dans laquelle nous pénétrons avec une extrême prudence, revolver au
poing.
La sape, bien construite, possède un
plancher.
Nous butons, à plusieurs reprises
contre des tentures qui bouchent le passage.
A un moment donné nous apercevons
-50-
une petite clarté qui filtre sur le
côté d’une tenture.
Aucun bruit. J’écarte le rideau et me
trouve en présence de 2 soldats allemands qui font la cuisine.
Ces oubliés se rendent sans difficulté.
Nous cassons la croûte arrosée d’une bouteille de vin provenant d’un commerçant
de LAON.
Les Allemands nous offrent cigares et
eau de vie.
Nous étions tombés sur une coopérative
fort bien approvisionnée.
Nous revenons, alors sur nos pas avec
nos 2 prisonniers que nous remettons au Commandant.
Après quelques brèves explications, le
PC vient s’installer dans la sape. Aussitôt, un poste téléphonique est branché
avec la D.I. pendant que pionniers et agents de liaison font l’inventaire du
magasin : nombreuses bouteilles de vin, d’eau minérale, d’eau de vie, fûts
de choucroute etc…
Le commandant organise, dans la
journée, une distribution de tout ce qui peut être consommé sans danger, par le
Bataillon.
Depuis 2 jours, le canon tonne, sans
arrêt.
-51-
De grosses fermes qui avaient été
épargnées, lors des attaques antérieures, sont réduites en cendres.
Le 5 Mai, le Bataillon prend ses
positions d’attaque. Chaque Compagnie s’installe dans des salles d’armes
préparées face à l’éperon de BRAY.
Nous devons attaquer, au jour, entre le
2ème BCP et le 106ème R.I.
A 6h30, déclanchement de l’opération.
Elan remarquable. Au prix de pertes
sévères, la progression a été satisfaisante.
Vers minuit, les Allemands déclanchent
une contre-attaque.
Plusieurs officiers sont mis hors de
combat.
Je prends le commandement des rescapés
de la Compagnie – une quarantaine d’hommes - et nous fonçons sur la tranchée du
HAVRE.
Nous l’occupons entièrement et
parvenons à nous y maintenir malgré un feu nourri d’artillerie.
Un camarade blessé, l’adjudant ADRIAN,
meurt au petit jour, après avoir appelé sa mère toute la nuit.
Avec le jour qui se lève, la pluie
commence à tomber.
-52-
Un Allemand est tué sur le parapet de
la tranchée.
A notre droite, un petit groupe, qui
cherche à s’infiltrer, est tenu en échec.
Finalement, la tranchée reste entre nos
mains.
Elle est jonchée de matériaux divers,
de cadavres et de blessés.
Toute la journée se passe à parfaire
notre installation et à tenter de mettre à l’abri nos blessés et nos morts.
Le 6 mai, à 16 h, arrive, à nouveau,
l’ordre d’attaquer. Notre objectif est le bois du DRAPEAU.
Nous devançant de quelques minutes, les
Allemands lancent une attaque, sans grande conviction semble t-il.
A 50 mètres, nous les recevons
vigoureusement : l’attaque est disloquée.
Une corvée allemande, égarée, apporte
des caisses de grenades à l’un de nos petits postes et se rend sans difficulté.
Après une nuit calme, nous sommes
relevés.
-53-
m'annonce que je suis proposé pour une
citation et la Médaille Militaire.
Le Général de Division passe le
Bataillon en revue ; le Général de C.A. décore le fanion.
Nous occupons du 2 au 14 juillet le
secteur de BEAUMONT.
Après un séjour, sans histoire, de
divers cantonnements, nous remontons en ligne à FLIREY.
Ma section occupe le bec de canard,
secteur des torpilles que nous recevons jour et nuit, heureusement sans trop de
dégâts.
La médaille militaire m'est remise à
DOMEVRE, par le Général Commandant la 11ème D.I.
Après la revue, le Commandant m'invite
à déjeuner.
Le Commandement du pel[o]ton des
pionniers m'est confié : 2 sergents, 8 caporaux, 40 chasseurs.
Puis, nous occupons plusieurs secteurs
qui n'appellent pas d'observation.
Les tranchées à Flirey |
Les villages dans lesquels était stationné le 4ème BCP en octobre 1917 au Nord-Est de Nancy (secteur de Custines, Eulmont, Agincourt, Laître-sous-Amance) |
-54-
Nous défilons à NANCY et sommes passés
en revue par le Général Commandant le 20ème Corps d'Armée et Mr MIRMAN, Préfet
de Meurthe-et-Moselle.
Alors que nous avions fait de sérieux
préparatifs pour le réveillon, nous faisons mouvement, plein[s] de mélancolie.
Traversée de NANCY, sans fanfare, en
raison du verglas. Embarquement à LUDRES. Direction BAR-LE-DUC. Nous nous
rapprochons de VERDUN.
Un télégramme nous apprend
l'attribution, au Bataillon, de la fourragère aux couleurs de la Croix de
guerre.
Celle-ci est remise, par le Général
PETAIN Commandant d'Armée, au cours d'une prise d'armes qui se déroule, sur les
pentes du fort de REGRET, en présence de détachements de toutes les unités du
20ème C.A.
En fin de cérémonie, je reçois du
Général PETAIN une fourragère en soie fantaisie et un étui à cigarettes à titre
de souvenir personnel.
Le lendemain matin, le Bataillon, en
formation diluée, monte en réserve de division aux carrières d'HOUDREMONT en
passant par la côte du POIVRE.
Secteur de Verdun du fort de Regret aux carrières de Houdromont (Houdremont dans le texte) |
Le secteur de Verdun où se trouvait Udalric Viet en janvier et février 1918 |
Secteur du Bois de Neuville - Les Fosses où fut gazé Udalric Viet |
-55-
Peu de temps après notre arrivée, nous amorçons la construction d’un PC.
Mes hommes (tous d’anciens mineurs) et
moi-même travaillons dans le roc, à la barre à mine.
En creusant, nous mettons à jour une
sape qui s’est effondrée sur tous ses occupants. Certains ont des cartes à
jouer à la main. Les visages sont parcheminés.
Nous assurons, au mieux, la sépulture
de ces braves.
Puis, nous montons en ligne et, peu de
temps après, repoussons un coup de main.
Après, un nouveau séjour aux carrières,
nous reprenons les lignes dans un secteur soumis à de violents bombardements
par obus toxiques.
Je résiste plusieurs jours mais,
finalement, suis obligé de partir vers le poste de secours. Je me fais
accompagner par mon ordonnance.
Puis, je suis dirigé sur l’ambulance
hôpital de GLORIEUX ou je reçois les premiers soins.
Je souffre énormément des yeux :
je ne vois d’ailleurs plus clair.
Beaucoup de blessés sont évacués sur
l’intérieur.
L’on voit arriver beaucoup de chasseurs
et
-56-
gradés du Bataillon. Puis, c'est le
tour du Commandant, lui-même qui est sérieusement gazé.
Logé dans une chambre voisine de la
mienne, il se remet assez rapidement et, avant de partir en permission, me
demande de rejoindre dès que possible, le Bataillon où il y a de nombreux
vides.
Le 16 Mars je demande à sortir de
l’hôpital et [le] rejoins.
Le 8 avril, nous faisons mouvement pour
aboutir à quelques kilomètres de CHALONS-SUR-MARNE.
Dés notre débarquement, nous sommes
avisés que, d'un moment à l'autre, nous pouvons engager le combat.
Le 4 mai, je prends le train, me
rendant en permission.
En cours de route, la ligne que nous
empruntons est bombardée par l'aviation. Le train est arrêté. Nous nous
abritons sous les wagons.
A peu de distance, un camp anglais
composé de travailleurs chinois vient d’être complètement détruit.
Des cadavres, plus ou moins déchiquetés,
sont accrochés dans les arbres.
Triste spectacle.
-57-
Enfin, j'arrive à AMIENS où ma mère est
réfugiée. Là, je trouve mon père et mon frère, permissionnaires également,
arrivés les jours précédents.
C'est la première fois que la famille
est réunie depuis août 1914.
A force de volonté, ma mère parvient à
refouler les larmes qui lui montent aux yeux.
Et puis, en 5 jours, toute la famille
est, de nouveau, disloquée : chacun est reparti vers son destin.
Le Commandant POMPEY est nommé
Lieutenant – Colonel au 1er Zouaves et remplacé par le Commandant DE LA
GUILLONIERE.
C'est avec un vif regret que je vois partir mon ancien Chef.
Nous embarquons pour VERBERIE et
stationnons dans plusieurs cantonnements.
Le 9 Juin, à minuit, alerte.
L'attaque allemande, attendue, est déclanchée.
Nous occupons nos positions de combat,
en liaison avec le 69ème R.I., en direction de MAIRY, village
-58-
qui venait d'être perdu et que nous
avons pour mission de reprendre.
Nous y parvenons mais perdons 25 tués
dont 2 officiers et 60 blessés. Mon ordonnance est tué.
J'entre dans le village, suivi de la
liaison du Commandant.
Notre progression est lente car de
nombreux Allemands sont restés dans les maisons en lisière du bourg.
Nous signalons notre progression, par
panneaux, à l'avion divisionnaire.
Une attaque importante, avec chars, est
alors déclanchée par notre E.M.
Elle progresse mais de nombreux chars
sont touchés par le tir de l'artillerie.
Nous sommes, enfin, relevés et, le
lendemain matin, embarqués en camions.
Nouveaux cantonnements, occupation de
positions de réserve, remontée en secteur. Affaires de peu d'envergure sauf le
18 juillet où nous prononçons une attaque assez sérieuse - sous un violent bombardement - au cours de laquelle nous
faisons des prisonniers.
Les positions du 4ème BCP à la mi - juillet 1918 |
Les positions du 4ème BCP les 19 - 22 juillet 1918 |
Cependant, je suis, de nouveau, atteint par les gaz et évacué sur l'ambulance 7/20 à
-59-
VERTEFEUILLE, près de PIERREFONDS.
Enfin, le 26 Juillet 1918, j'abandonne
la tenue bleu / jonquille à laquelle m'attachent tant de souvenirs.
Toutefois, la guerre n'est pas terminée
pour moi.
Je la poursuivrai, jusqu'à son terme
sous l’écusson du 6ème Tirailleurs Algériens, régiment dans le quel je viens
d'être nommé sous-lieutenant.
Voir l'annexe II pour la fin de la guerre dans le 6ème régiment de tirailleurs algériens
Le récit qui précède a été tiré des
carnets de route du lieutenant U.Viet.
FIN
DE LA CAMPAGNE 1914-18
SEJOUR
EN ORIENT
GUERRE
1939-45
LA
RESISTANCE
Le lieutenant Viet participe aux
opérations menées par le 6ème Régiment de tirailleurs algériens notamment aux
combats de Thiescourt, dans des conditions souvent difficiles en raison de
l'extrême réduction des effectifs.
Il est, de nouveau, gazé à 2 reprises
le 21 août et 19 octobre.
Mais c'est, maintenant la guerre en
rase compagne et son déroulement autorise les plus grands espoirs.
Enfin, le régiment est arrivé à
proximité de la frontière belge lorsque sonne le « CESSEZ- LE- FEU ».
11 novembre 1918. La grande aventure
est terminée.
________________________________________________
En mai 1919, il embarque, avec son
Régiment pour l'Orient avec escale en Hongrie.
-61-
Son séjour, hors de
France, est marqué par :
- Sa participation aux opérations secondaires dans
lesquelles est engagé son régiment sur le front BOLCHEVICK – HONGROIS.
-
L’accomplissement de missions spéciales.
- Son hospitalisation, à CONSTANTINOPLE, du 24 septembre au 11 novembre 1919 (suite d'intoxication par gaz).
Après un passage de 18 mois à l'EM de la Division Territoriale de TURQUIE, il regagne la France en juin 1921.
- Son hospitalisation, à CONSTANTINOPLE, du 24 septembre au 11 novembre 1919 (suite d'intoxication par gaz).
Après un passage de 18 mois à l'EM de la Division Territoriale de TURQUIE, il regagne la France en juin 1921.
__________________________________
Sur sa demande, il est affecté au 26ème BCP qui tient garnison à THIONVILLE.
Le 28 mai 1930, il porte, lors de sa présentation à la garnison de METZ, le Drapeau des Chasseurs, véritable relique dont les lambeaux sont réunis dans un filet.
Heures émouvantes.
A NANCY, où il sert au 26ème RI, le capitaine VIET se dépense, en dehors de ses attributions normales, en collaborant de façon active:
- A l’élaboration des mesures visant à
-62-
la protection contre les dangers
aériens de la ville de NANCY
- à l'instruction, dans plusieurs
centres de MEURTHE-ET-MOSELLE, des cadres d'Officiers et de sous officiers de
réserve.
__________________
Puis, c'est de nouveau de la guerre. Le
11 Septembre 1939 il passe, comme Chef de Bataillon, au 223e RI.
Au cours de l'hiver 1939-40, son
Régiment composé, en presque totalité, de réservistes, tient les lignes dans un
secteur où l'activité se limite à des opérations de patrouilles.
Après la rupture du front, sa division
est repliée en arrière de la ligne MAGINOT pour être, ensuite, dirigée sur les
VOSGES en vue d'un grand regroupement d'unités.
Le 21 Juin 1940, il est fait prisonnier
à BRU (Vosges) au milieu de ses hommes.
Journée pleine d’amertume avec une
satisfaction, cependant : dans son Bataillon, les défections ont été
pratiquement nulles.
Puis, c'est l'internement à NUREMBERG.
-63-
En septembre 1941, ayant besoin d'un
dérivatif, il s'affaire [s’affaisse], volontairement, au cours d'un appel.
Relevé, il est conduit à l'infirmerie,
où (suivant les conseils d'un médecin français), il se plaint au docteur
allemand, qui l'examine, du passage continu, devant ses yeux, de mouches
volantes, ce qui lui vaut 2 jours d'exemption d'appel.
Mais, le lendemain, il est tout ébahi
d'être convoqué, de nouveau, devant les docteurs qui sont 3, cette fois, et
l'examinent consciencieusement.
Finalement, l'un d'eux laisse échapper
« FRANKREICH », ce qui, sans aucun doute, ouvre la voie du
rapatriement.
Effectivement, il suffit d'attendre le
passage d'un train sanitaire.
(Tout porte à croire que c'est une
demande faite, dans ce sens, par la famille, auprès de la Croix Rouge
Internationale, qui a provoqué ce deuxième examen).
Mais, entre temps, le « tour
d'évasion » du capitaine VIET était arrivé. Malgré la proximité de son
rapatriement, il décide de tenter l'aventure ; celle-ci étant, au
demeurant, préparée minutieusement par des camarades devenus spécialistes.
-64-
Il sera accompagné d'un lieutenant
d'origine alsacienne parlant parfaitement l'allemand et qu'une tentative
antérieure n'avait pas découragé.
Tous deux, habillés en civil, plume au
chapeau, franchissent, aisément, l'entrée du camp, en prenant, à l'aide de
mètres, de prétendues mesures.
Arrivée à la gare où se trouve une
foule compacte devant assister, vraisemblablement, à une manifestation nazie,
avec encadrement important de policiers.
Cette présence pouvant constituer un
risque complémentaire, les 2 hommes décident de gagner une autre gare, éloignée
de plusieurs kilomètres, où il leur faudra attendre un train pendant un certain
temps.
Le voyage dure depuis plusieurs heures
déjà lorsque, à une station, des policiers collectent les papiers d'identité de
tous les voyageurs pour leur rendre au bout d'un moment, mais les 2 fugitifs ne
reçoivent pas les leurs et sont conduits au bureau du chef de gare.
En raison du temps perdu, l'alerte
avait pu être donnée efficacement. L'heure de vérité était venue.
Conduits dans une caserne de
gendarmerie, ils sont traités, fort courtoisement, par un officier d'origine
autrichienne puis, escortés par un sous –
-65-
officier, ils regagnent le camp.
Le capitaine Viet est puni de 10 jours
de cellule qu'il m'accomplit d'ailleurs pas, en raison de l’encombrement des
locaux disciplinaires.
Mais, une pensée reste, sans cesse,
présente à son esprit « est-ce que le
rapatriement sanitaire tient toujours ?»
Enfin, le jour de la délivrance arrive
mais l'incertitude demeure jusqu'au moment où le train franchit la ligne de
démarcation.
_________________________________________________
Rapidement, le commandant Viet prend
une part active [comme résistant], ce qui lui vaut 2 citations élogieuses et le
désigne pour le commandement -comme chef de corps - du bataillon de sécurité de
l'AIN.
___________________________________________________
Le 13 septembre 1950, alors qu'il
est affecté à l’État- Major de la subdivision de Marseille, le lieutenant -
colonel Viet demande sa mise à la retraite.
Il quitte, avec l'émotion que l'on
devine, cet uniforme qu'il a honoré pendant près de 40 ans, conscient d'avoir
bien servi son pays pour lequel il a tant souffert et versé, si généreusement,
son sang.
-----------------------------------------------------------------------------
ANNEXE
I
Abréviations
utilisées dans le récit
BCP :
bataillon de chasseurs à pied.
CA :
corps d’armée.
DI :
Division d’infanterie.
EM :
Etat Major.
FFI :
Forces Françaises de l’Intérieur.
RI :
régiment d’infanterie.
SHR : section hors rang (chargée des travaux de terrassement).
SHR : section hors rang (chargée des travaux de terrassement).
TD :
titre définitif.
TT :
titre temporaire.
ANNEXE
II
Les
carnets d’Udalric Viet sont peu détaillés sur la fin de la Grande Guerre, après
l’incorporation dans le 6ème Régiment de Tirailleurs Algériens en
juillet 1918. Le dossier militaire, conservé aux archives de la légion d'honneur à Fontainebleau et
numérisé, permet de suivre le parcours d’Udalric grâce à la page concernant
« les affaires », c’est-à-dire les batailles auxquelles il avait pris
part. En juillet 1918, Udalric se trouvait dans l’Oise, à l’est de Noyon. Après
Tricot et Méry (orthographié Mairy dans le carnet), il est engagé à partir du
18 du mois dans l’est de Soissons, aux frontières de l’Aisne, à Saint-Bandry,
Hignières-en-Haut (où il est atteint par les gaz le 18 juillet) et Pernant. Le
13 août 1918, il combat encore dans l’Oise à Thiescourt puis à Renansart, dans
les environs de Soissons, en octobre 1918. Intoxiqué encore deux fois par les gaz
(le 21 août à Noyon et le 19 septembre à Renansart), il ne retrouve son
régiment que le 5 novembre 1918, dans les environs de Thiescourt et Cuvilly,
avant la relève du 9 novembre.
Secteur de Thiescourt dans l'Oise, près de Noyon. |
Secteur de Tricot - Méry - Cuvilly (Oise) |
L'est de Soissons (Aisne) avec Saint-Bandry, Hignières-en-Haut, Pernant. |
Secteur de Renansart |
La guerre s’achève pour lui à la Fère le 11
novembre 1918. Un fragment tapuscrit des carnets permet de voir ces derniers
mois de guerre :
1ère page.
« Comment et où
j’ai terminé la Guerre 1914-1918 »
SITUATION du régiment
aux derniers jours de la Grande Guerre :
Nous sommes toujours en
ligne. Le régiment qui fait partie de la 58ème Division (général
PRIOUX) fait campagne aux côtés du 11ème régiment de marche de
Tirailleurs Algériens. Actuellement, nous sommes devant CUVILLY – THIESCOURT,
massif boisé aux confins de l’Aisne et de l’Oise. Les combats sont très
durs ; les Allemands sont tous les jours arrêtés dans leur avance sur
PARIS. Les Allemands nous infligent des pertes sévères (3 colonels - 5 chefs de
bataillon - 11 capitaines en quelques jours). Les lieutenants et les cadres du
régiment ont aussi souffert. Les Tirailleurs ne sont pas épargnés non
plus ; le R.I. fond tout doucement de telle sorte qu’en fin de combats je
me retrouve en tête du Bataillon avec un Officier indigène LAGRA – CHAREF et
voilà l’ordre de bataille du régiment. L’on parle d’une relève, pour permettre
à la division de recevoir des renforts ; nous irons dans la région de la
FERE, ce n’est plus le front mais c’est tout de même un peu plus confortable.
Dans la soirée du 8 novembre 1918, nous sommes relevés par le 3° Bataillon du
11° Régiment de Tirailleurs qui était en réserve de division et maintenant nous
nous mettons en route vers un repos bien gagné.
Nous ne cantonnerons
pas, nous passons la nuit au bivouac dans des maisons en général détruites, par
le bombardement, toujours sur nos gardes bien entendu, craignant toujours un
retour offensif de l’ennemi.
Nous avons passé la
nuit au bivouac, nous sommes dans les ruines des villages voisins de CUVILLY et
THIESCOURT, nous avons dormi bien tranquillement, souvent un bruit de fusillade
puis rien. Le calme dans la nuit, peu de fusées éclairantes, c’est la
tranquillité même. Le nom des villages nommés plus haut devrait se dire
clairement ex-village ou plutôt amas de ruines sur lequel il y avait jadis un
village, ou THIESCOURT ou CUVILLY ; voilà une mise au point qui
s’imposait. La relève s’effectue tranquillement en compagnie du 11° régiment de
Tirailleurs [qui] arrivent sous la conduite de guides que nous avions envoyés à
l’entrée de THIESCOURT.
Après avoir traversé
des villages en ruines, nous arrivons sur la route qui doit nous conduire à
« LA FERE », sans un coup de canon, nous marchons silencieusement et
je dirais même rapidement.
Nous sommes en route
vers « La FERE » dès le petit jour, où nous nous trouvons en fin de
journée, comme prévu ; les éléments (Compagnies etc…) arrivent déjà, les
cantonnements sont rapidement faits, tout le monde est casé.
Nous sommes tellement
fatigués que nous nous étendons sur la paille dans une pièce qui certainement a
été jadis le salon d’un brillant officier d’artillerie ; nous nous
endormons très rapidement et c’est au jour qu’un quart de café très chaud
réveille ceux qui auraient encore bien voulu dormir. Par une ouverture située
au milieu d’un mur, probablement un… »
FIN
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Elèves de la classe de 1ère L / ES (601) ayant travaillé sur le projet "Carnets de Guerre du lieutenant-colonel Udalric Viet" en 2014-2015:
Nicolas BILLET
Camille BOTTO
Victoria BOUMOKONIA
Antoine CACLIN
Amara CAMARA
Chloé CANTO
Julia CARACCIOLO
Laura CAUZERET
Lucas DELLA CHIESA
Gaëtan ENGELHARDT
Simon FAIVRE
Shana FRANCOIS
Chloé GATTO
Angélique GONZALEZ-GARCIA
Rose HAMET
Johanna HARY
Alexia HEYMS
Kelly HUI BON HOA
Juliette JAMIN
Marie LABOURE
Adrien LEFORT
Célia LEMAIRE
Léa LHEUREUX
Eloïse LHUILLIER
Imène MEDJ MEDJ
Margaux NOVAK
Manel OUADDOU
Lucie REIGNIER
Caroline RODHAIN
Juliette ROLLIN
Manon SALIER
Camille SCHEMMEL
Emilie SIMONIN
Fadel SOUDANI
Sous la direction de Jérôme JANCZUKIEWICZ, professeur d'histoire et de géographie.
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Elèves de la classe de 1ère L / ES (601) ayant travaillé sur le projet "Carnets de Guerre du lieutenant-colonel Udalric Viet" en 2014-2015:
Nicolas BILLET
Camille BOTTO
Victoria BOUMOKONIA
Antoine CACLIN
Amara CAMARA
Chloé CANTO
Julia CARACCIOLO
Laura CAUZERET
Lucas DELLA CHIESA
Gaëtan ENGELHARDT
Simon FAIVRE
Shana FRANCOIS
Chloé GATTO
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Célia LEMAIRE
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Imène MEDJ MEDJ
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Manel OUADDOU
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Caroline RODHAIN
Juliette ROLLIN
Manon SALIER
Camille SCHEMMEL
Emilie SIMONIN
Fadel SOUDANI
Sous la direction de Jérôme JANCZUKIEWICZ, professeur d'histoire et de géographie.